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caen:tractbologne

====== Projet de tract sur Bologne ====== Les universités menacées partout en Europe : ne nous trompons pas de cible ! L’Université est, entre autres, accusée par le gouvernement et de nombreux médias de ne pas suffisamment collaborer avec le monde de l’entreprise pour former les étudiants à des métiers utiles à la société ou pour alimenter l’économie française en nouvelles découvertes. D’où une avalanche de réformes marquées par une obsession du court terme et par la défense des intérêts des grandes entreprises et de leurs actionnaires, sur fond de croyance illimitée dans les bienfaits de la concurrence. Ceci n'est pas une situation propre à la France, loin de là, et la plupart des pays européens sont concernés. Même si aujourd’hui, la crise financière et ses suites remettent en causes les dogmes néolibéraux, rien n’y fait, et partout un entêtement aveugle préside aux réformes. Certes, la transformation néolibérale des établissements d’enseignement supérieur et des laboratoires de recherche a débuté avant l’élection de N. Sarkozy en 2007. Mais cette élection en a ouvert une phase d’une ampleur et d’une gravité sans précédent, dans laquelle des principes fondamentaux comme l’égalité entre étudiants et entre territoires, la liberté académique ou la démocratie interne sont bafoués par la mise en concurrence, par la répartition des moyens publics en fonction de critères de rentabilité à court terme, par un accroissement de la précarité du personnel, et par les renforcements du pouvoir de financeurs privés et du pouvoir du ministère : « Pacte pour la recherche » du 18 avril 2006 ; loi relative aux Libertés et responsabilités des universités (LRU) du 10 août 2007 ; réforme des Grands organismes de recherche (2008), opération campus (2008), projet de réforme de la formation et du recrutement des professeurs de l’enseignement primaire et secondaire (2008) ; projet de modification des statuts des enseignants-chercheurs (2008). À cette liste s’ajoute une attaque frontale contre la laïcité, l’accord du 18 décembre 2008 signé avec le Vatican donnant aux facultés catholiques le droit de collation des grades universitaires, c’est-à-dire le droit de décerner les diplômes de licence, master et doctorat. À terme, le baccalauréat, premier grade universitaire, devrait être concerné. La dérive marchande européenne Les lois de « réforme » de l'enseignement supérieur s’inscrivent toutes dans un processus européen et mondial de mise en concurrence et de marchandisation de l’éducation. Ainsi, l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) prévoit l’inclusion de l’enseignement et la recherche dans le processus de marchandisation et de libéralisation du commerce des services. Cet accord, engagé dès 1995 par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), concerne aujourd’hui 153 pays. Dans un premier temps, l’Union européenne (UE) avait affirmé que l’enseignement public sortait du champ de l’AGCS, parce qu’il était organisé par les États. Mais, sous la pression des néolibéraux de pays anglo-saxons, de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et d’entreprises multinationales, les États européens préparent l’intégration pleine et entière de l’enseignement supérieur dans le grand marché mondial. Ainsi, la Stratégie de Lisbonne (2000) fixe pour l’UE l’objectif d’une « économie de la connaissance la plus compétitive » du monde. À cette fin « l’esprit d’entreprise et les aptitudes sociales » sont mis explicitement sur la liste des « nouvelles compétences de base dont l’éducation et la formation tout au long de la vie doivent permettre l’acquisition ». Un an auparavant, en 1999, le Processus de Bologne avait programmé l’harmonisation du système européen de l’enseignement supérieur de 46 pays européens, notamment en vue « d’améliorer la compétitivité du système d’enseignement supérieur européen à l’échelon mondial » et d’établir « un espace européen de l’enseignement supérieur » [5]. Concrètement, il s’agissait d’homogénéiser les diplômes, les acteurs et les pratiques. Mais, par là-même, seraient finalement réalisées les conditions nécessaires à la création d’un marché prêt à s’ouvrir au plan mondial, comme l’indiquait en 2002 le Dr Andris Barblan, de l’Association européenne des universités (qui regroupe les présidents des universités européennes et participe activement au processus) : « La reconnaissance et la comparabilité de différents systèmes d’enseignement supérieur, nationaux ou autres, représentent une étape nécessaire de collaboration avant que les pays puissent s’accorder sur la comparabilité des actions qui est nécessaire pour l’application de l’AGCS. Lorsque les deux premières étapes de coopération seront accomplies, les procédures de l’AGCS pourront être appliquées, grâce à cette nouvelle confiance entre les acteurs, devenus partenaires dans le champ de l’enseignement supérieur. » Mobilisations dans toute l'Europe La plupart des pays européens sont touchés par des attaques semblables (et parfois pires) à ce que nous connaissons en France. Face à cela, les mobilisations sont partout importantes et montrent un désir commun d'en finir avec ces politiques. En Grèce, la colère est partie des universités et s'est étendue à tout le pays. La jeunesse et les travailleurs se sont insurgés, dans tous les espaces publics, contre leur gouvernement corrompu et ses réformes néo-libérales. Là-bas, l'autonomie des universités est actée, il n'y a plus de seconde chance après un redoublement, et l'enseignement privé prend de plus en plus de place sur le public. En Espagne, on ne compte plus le nombre de facultés occupées ces dernières années, mobilisées contre le processus de Bologne. Depuis octobre 2008, la mobilisation et la grève contre le « plan Bologne » connait une grande ampleur et rassemble tous les acteurs du supérieur, avec plusieurs lieux occupés (facs, rectorat de Barcelone, etc). En Italie, depuis novembre 2008, le monde de l’éducation est en révolte contre la désastreuse loi Gelmini, et les facultés construisent, jour après jour, une autre réforme du système universitaire. De nombreuses occupations de facs et d'autres lieux extra-universitaires ont été lancées fin février dans plusieurs villes (Bologne, Milan, Rome...). En Finlande, le mouvement a été lancé en dehors des orgas syndicales contre le récent projet de réforme des universités. Au Danemark, aux dernières nouvelles, il y a toujours une occupation d'une partie de l'université de Copenhague. Les étudiants sont mobilisés contre la suppression de l'aide aux étudiants. En Allemagne la mobilisation grandit et l'idée d'une « Semaine globale d'action » autour de l'éducation partout en Europe a été lancée. Toutes ces mobilisations s’opposent à des réformes qui ne sont ni sectorielles, ni nationales mais la poursuite de logiques néolibérales imposées à l’échelle mondiale. On assiste à une privatisation sauvage de l’instruction et à l’asservissement de l’enseignement supérieur au pouvoir économique. Les mouvements débordent largement le cadre universitaire et le monde de l’éducation. Tous les mouvements se rassemblent peu à peu dans la même direction : une opposition totale à la rentabilisation des biens communs.

caen/tractbologne.txt · Dernière modification: 2009/03/02 17:21 par 84.101.197.52