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caen:formationeau

====== Pour un accès de tous à l'eau ====== //(par Max)// L'eau est la source fondamentale de la vie sur Terre, mais également une source de conflits, d'inégalités et d'aggravation des conditions de vie de certaines populations. ===== Quelques chiffres ===== * 2,5% du volume d'eau de la planète est constitué d'eau douce. Dans cette part, environ 35% se retrouve dans les neiges et les glaciers, 64% dans les nappes souterraines, et moins de 1% dans l'humidité atmosphérique. * Les lacs et rivières ne constituent que 0,3% de l'eau douce, soit 0,01% du volume global d'eau, pour satisfaire les besoins de l'Homme et son environnement : boisson, hygiène, production de denrées alimentaires, de biens énergétiques et industriels, ainsi que pour l'écosystème naturel. C'est un quantité bien suffisante pour satisfaire l'ensemble de l'humanité. Mais la répartition de cette eau douce est très inégale : 9 pays en concentrent 60% (Brésil, Russie, E.-U., Canada, Chine, Indonésie, Inde, Colombie et Pérou). * L'utilisation des ressources varie selon les conditions climatiques et le développement économique. Dans beaucoup de pays du Sud, 80% est utilisé pour l'agriculture Dans l'OCDE, 40% va dans l'agriculture, 45% dans l'industrie et 15% pour l'usage domestique. * 1,4 milliard d'humains n'ont pas accès à l'eau potable * 2,5 milliards n'ont pas de système d'assainissement de base, touchant les pays et les catégories de populations les plus pauvres * 40 000 personnes meurent chaque jour en buvant de l'eau contaminée. * Sur les 815 millions de personnes qui souffrent de malnutrition dans le monde, 804 millions sont dans les pays du Sud. * Un Européen consomme 5 à 8 fois plus d'eau par jour qu'un Africain * La France utilise440km3 d'eau par an. ===== Principales causes du déséquilibre Nord/Sud ===== Les raisons géographiques n'expliquent pas tout. Les choix économiques mondiaux et le poids permanent de la dette de nombreux pays les a soumis aux plans d'ajustement structurels des institutions financières internationales. L'accès à l'eau dans ces pays a totalement été écarté des priorités et son exploitation a dans tous les cas été privatisé. Alors que la grande majorité des opérateurs mondiaux de l'eau sont locaux ou privés, les IFI ont toujours tenté de placer l'exploitation et la distribution de l'eau aux mains de grandes multinationales privées, souvent françaises, qui ont choisi leurs lieux d'implantation en fonction de l'intérêt rentable qu'ils pouvaient offrir. Le manque de poids politique de beaucoup de ces pays ou les choix de leurs dirigeants les ont souvent laissés totalement à l'écart. Il n'y a aucune gouvernance mondiale sur la question de l'eau. En 2000, la communauté mondiale s'était engagée à travers les Objectifs du Millénaire pour le développement «à réduire de moitié d’ici à 2015 le pourcentage de la population qui n’a pas accès de façon durable d’un approvisionnement en eau potable». Aujourd'hui, l'ONU estime qu'il faudra attendre 2040 pour l'Afrique subsaharienne et 2076 pour les objectifs d'assainissement... Il est en plus à noter que la population mondiale passera d'ici à 2015 de 6,7 à 9 milliards... L'eau potable en quantité suffisante est un droit que les États doivent garantir pour pouvoir vivre dignement dans un environnement sain. Or, l'accès limité (appelé «stress hydrique») s'accentue dès lors que les droits et les libertés sont limités. La crise écologique et la pollution croissante n'arrangent pas cette situation. ===== Pourquoi les Objectifs du Millénaire pour le Développement ne suffisent pas ? ===== Ils concernent l'eau, mais également un large ensemble de secteurs : éducation, santé, environnement, etc. L'eau ne devrait pas être une cible parmi d'autres, mais pourtant elle ne figure que dans l'objectif n°7 : «assurer un environnement durable» Selon le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) : «Tout comme la faim dans le monde, le manque d'accès à l'eau est un fléau silencieux qui frappe les pauvres tout en restant toléré par ceux qui possèdent des ressources, de la technologie et du pouvoir politique nécessaires pour y mettre fin». ===== Quel développement ? ===== Un autre modèle de développement est aujourd'hui à imposer au niveau mondial, pour en finir avec les aides à l'occidentale aux effets dévastateurs. Nous ne devons plus imposer des plans décidés à l'avance, très souvent en décalage complet avec les besoins des populations, qui n'ont pas leur mot à dire. Pour ce qui est de l'eau, un exemple frappant fut la création de puits depuis les années 70. Les pays du Nord ont longtemps construit des puits clés en main. Résultat : les modes de gestion villageoise mis en place ne clarifient souvent pas les rôles et la responsabilité des acteurs. On ne savait pas ce qu'il fallait faire en cas de problème ou de panne. Face à cela, avoir accès à l'eau de manière durable passe par l'organisation politique et professionnelle d'un véritable service public pour un territoire cohérent, ainsi qu'une clarification des rôles, droits et devoirs de chacun, au sein de mécanismes efficaces et évolutifs. Plus globalement, les choix de développement au niveau mondial engendrent les catastrophes nombreuses et principalement de grandes pollutions. ===== L'eau et l'agriculture ===== L’agriculture utilise actuellement des méthodes intensives menant à la surproduction d’aliments de toute sorte non pas destinés à l’élimination de la faim dans le monde, mais à leur vente pour produire des profits servant à développer les sociétés multinationales, rémunérer grassement leurs dirigeants et à verser des dividendes aux actionnaires de ces mêmes sociétés. Ce type d’agriculture provoque une surconsommation d’eau, notamment dans la production de céréales comme le maïs. Certains pays se consacrent également à la production d’aliments hors saison pour satisfaire les besoins des marchés internationaux et se procurer ainsi des devises. C'est par exemple le cas des tomates en Espagne. Ces choix entrainent de grandes pollutions liées à la consommation d'engrais, de produits phytosanitaires (herbicides, pesticides, insecticides) et à la concentration des élevages. ===== L'eau et l'industrie ===== L'industrie consomme elle aussi beaucoup d'eau. Par exemple, la production d'une seule voiture nécessite 400m3 d'eau. Elle est aussi source de grandes pollutions car elle rejette des matières organiques qui provoquent la mort des poissons et détruit l'écosystème des rivières. Environ 90% des métaux toxiques sont également rejetés directement. Les rejets les plus polluants proviennent pour l’essentiel de l’industrie électronique, de l’ensemble sidérurgie-métallurgie-fonderie, des usines de traitement des déchets, des activités d’assemblage et de l’imprimerie. D’une manière générale la pollution comme toute activité humaine, est responsable aussi de l’effet de serre et le réchauffement climatique. Nous passerons sur les centrales nucléaires qui utilisent l'eau des fleuves pour refroidir les réacteurs et la rejettent chaude. ===== Du coté des consommateurs : des services publics de l'eau justes et démocratiques ===== La création et la gestion de ces services publics d'un genre nouveau doit répondre à des obligations de concertation et de démocratie. C'est ce que tente de diffuser le réseau Reclaiming public water qui souhaite apporter des modèles de gestion publique performants et progressistes. Ce réseau créé en 2005 rassemble des militants de la société civile, des universitaires, des syndicats, des décideurs du service public de l'eau et des professionnels du secteur. Ils mettent l'accent sur la nécessité d'établir des liens très étroits entre les services publics de l'eau et les usagers. Ainsi, rendre des comptes aux usagers s'est révélé être la clé pour améliorer l'accès à l'eau potable des plus pauvres et des plus marginalisés. D'autres innovations pour renforcer les services publics de l'eau jusqu'à l'ONU, qui a mis en place le Système de partenariats entre les opérateurs de l'eau (POE) afin que ces opérateurs puissent se rencontrer, échanger, et trouver des solutions aux problèmes qu'ils rencontrent. Ils peuvent ainsi dialoguer de façon directe et égale, sans l'intermédiaire de bailleurs ou des IFI. Ce système est en cours de construction et il faut encore développer les barrières nécessaires à empêcher les entrepreneurs et le banques d'en profiter pour fonder de nouveaux marchés. Les populations locales et les usagers doivent être toujours mis au cœur de ces réflexions et associées à toutes les étapes de chaque projet. Sur chaque continent, les exemples de construction de services démocratiques et participatifs montrent que la gestion solidaire et durable est la plus efficace, que ce soit en qualité et en coût. Ces populations peuvent imposer un tel système. C'est ce que l'on a par exemple vu en Bolivie en 2001 avec «la guerre de l'eau» à Cochbamba. La population à majorité Queshua s'est soulevée contre le projet de privatisation et a poussé la multinationale américaine Bechtel des frontières boliviennes. Ils ont ainsi voulu protéger l'eau considérés comme étant un cadeau de la Pachamama (la terre mère). Les Boliviens se sont organisés en comités d'eau, avec des groupes de représentants de quartiers, des conseils de surveillance et des élections transparentes. Cet événement a à la fois permis de mettre en place une gestion participative du service d'eau, mais de mettre sur pieds les bases d'un grand élan démocratique face aux ravages du libéralisme et des privatisations dans le pays. ===== La question du cout et de la gratuité de l'eau ===== Il y a sur cette question plusieurs points de vue. Le premier qui veut que l'eau a un cout auquel doit participer directement le consommateur. La gratuité de l'eau ne garantirait en rien l'accès de tous au service, et ce serait à l'impôt de le rémunérer. Mais toutes les sociétés humaines ne pourraient pas utiliser l'impôt dans ce sens, ce qui exclurait les plus pauvres. Pour eux, ce n'est pas le principe du paiement du service qui est contestable, mais l'accaparement de la ressource. Toute idée de privatisation est donc à exclure. D'autres pensent que même si l'usager est prêt à payer l'eau, la gratuité n'est pas à exclure. Elle pourrait se faire dans les limites d'une quantité quotidienne journalière moyenne (40 à 50 litres). L'eau étant un bien collectif vital, c'est à toute la collectivité de prendre en charge son cout. Ainsi, nul ne devrait être privé pour des raisons de solvabilité. Au Sud comme au Nord, ce sont l'industrie et l'agriculture qui consomment le plus d'eau et qui ne la paient pourtant quasiment jamais (gratuité ou subventions). L'eau gratuite ne signifie pas gaspillage : le consommateur la considère comme un bien précieux et ne souhaite pas dépasser la limite quotidienne. Seuls les plus riches surconsomment... La gratuité pourrait ainsi permettre aux pauvres de ne plus être les victimes d'un prix de l'eau exorbitant pour eux et souvent beaucoup plus chers dans les bidonvilles que dans les quartiers UP. Gratuit ou payant, le droit à l'eau (accès à l'eau potable et à l'assainissement) est de plus en plus à l'agenda des pays du Sud, mais beaucoup moins au Nord. ===== A quand des axes fermes et constructifs ? ===== Les sommets mondiaux se succèdent sans qu'aucune promesse ne se transforme en actes. Par exemple, en 2003, l'Union Européenne avait promis de créer un fond d'aide d'un milliard d'euros pour les pays les plus pauvres. Il n'est aujourd'hui que de 200 millions. On a vu que du côté de l'ONU, les OMD ne seront pas du tout atteints dans des délais acceptables. Mais ce ne sont ni les moyens financiers, ni la technique qui manquent : c'est la volonté politique. Il faut donc nous mobiliser pour que les fonds consacrés à l'eau soient renforcés et surtout correctement affectés. ===== L'école française et le partenariat public privé ===== La France joue un rôle particulier car elle a développé un modèle s'est répandu dans le monde entier, promu par les IFI et l’Union Européenne. Ce modèle français, appelé abusivement École française de l’eau, comporte des aspects d’une grande complexité. Plusieurs types de participants entrecroisent leur fonction, sans que la cohérence et la transparence soient assurées. Le responsable de l’eau est bien la collectivité territoriale, municipalité ou communauté de communes, mais qui ont la faculté de gérer leurs services comme ils l’entendent soit en régie soit en délégation. C’est le premier niveau de gestion. Le territoire français est découpé en six bassins versants, dirigés par autant d’Agences de l’eau dont la principale fonction est de récolter le montant des redevances que nous versons à chaque facture d’eau. C’est le deuxième niveau de gestion. Un autre acteur d’importance s’est glissé dans ce système depuis le XIXème siècle: les trois grandes entreprises de l'eau que sont Véolia-Environnement (anciennement Générale des Eaux), Suez-Lyonnaise des Eaux et la Saur (Société d’aménagement urbain et rural), filiale de la BNP. C'est le quatrième niveau de gestion. Pour chaque facture de consommation d’eau que nous réglons, nous versons à ces sociétés de quoi alimenter des bénéfices immenses. La gestion de l’eau est devenue un véritable marché représentant plus de 200 milliards d’euros d’installations construites et plus de 18 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel. La France aurait-elle des leçons à prendre des autres pays ? En France 99% de la population est raccordée à l'eau potable. Ce sont ces usagers qui portent la grande majorité du cout de l'eau en France, et qui paient même une grande partie du traitement de la pollution, pourtant majoritairement engendrée par l'industrie et l'agriculture. La représentation des usagers aux différents échelons du service d'eau est quasi-nulle, apparaissant principalement à travers les élus locaux et non de façon directe et participative. Il est reconnu que la délégation coute bien plus cher aux usagers que les réseaux en régies publiques alors que les réseaux délégués sont très mal entretenus : ils connaissent des pertes de 40 à 60% de l'eau avant qu'elle n'arrive au robinet. ==== Il faut réclamer avec fermeté: ==== * a) L’eau doit être un droit humain fondamental reconnu par tous pour qu’aucun être humain ne puisse en être privé; * b) L’eau est un bien patrimonial de l’humanité, que nous recevons en héritage et que nous devons laisser en l’état pour nos descendants; * c) Chaque être humain devra disposer gratuitement de 40 litres d’eau par jour (minimum vital préconisé par l’OMS et déjà mis en pratique en Afrique du Sud et en Belgique); * d) Le service de l’eau doit être impérativement public et géré avec la participation active et directe des citoyens/usagers; * e) Nous devons réformer en profondeur toutes les pratiques agricoles et industrielles grosses consommatrices de la ressource; * f) Le droit à l’eau et la gestion publique des services d’eau doivent être inscrits dans les Constitutions nationales et en tant que droit inaliénable dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme : Article 31 : //Tout le monde a le droit à l'accès à l'eau potable en quantité suffisante pour la santé et le bien-être de l'individu et de sa famille, et personne ne doit être privé d'un tel accès et d'une telle qualité d'eau à cause d'une circonstance économique individuelle.// Pétition sur http://article31.org

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